Immigration : Emmanuel Macron veut un « plan Marshall » pour l’Afrique.
Le président met en garde contre un échec de la politique de développement. Et prévient que l’Europe pourrait «le payer cher aussi sur le plan migratoire».
Pretoria (Afrique du Sud), le 28 mai. En marge de sa tournée en Afrique, le président Emmanuel Macron a distillé des messages à l'opinion française notamment sur l'immigration.
Les deux jours passés par Emmanuel Macron au Rwanda et en Afrique du Sud ont aussi été l'occasion de distiller quelques messages très politiques à destination de la scène française. En témoigne l'entretien qu'il a accordé au JDD en marge de ce déplacement, au cours duquel il a plaidé en faveur d'un « plan Marshall » post-Covid pour l'Afrique. « Si on est complices de l'échec de l'Afrique, on aura des comptes à rendre mais on le paiera cher aussi, notamment sur le plan migratoire », y estime le président, mettant en garde contre « un échec » de la politique de développement : « Si cette jeunesse africaine n'a pas d'opportunité économique, si on ne la forme pas, si on n'a pas de bons systèmes de santé en Afrique, alors elle émigrera. »
Le propos n'est chez lui pas nouveau, tant s'en faut. Le marteler n'est pas anodin non plus, dans ce contexte précampagne présidentielle, alors que la droite et l'extrême droite ne cessent de fustiger son bilan en la matière. D'autant qu'il le double, d'un message de fermeté sur le droit d'asile - thématique sensible au sein de sa propre majorité, si souvent divisée sur le sujet... Et d'un plaidoyer pro domo, déplorant que « la peur de l'autre monte » : « La réponse à la question migratoire prendra du temps parce qu'elle est exigeante, elle nous impose un investissement solidaire. » Au passage, le chef de l'Etat oppose une fin de non-recevoir à ceux qui, comme Marine Le Pen (RN) ou Michel Barnier (LR), demandent un moratoire sur l'immigration.
Messages politiques à Pretoria, aussi, samedi, dans un discours devant la communauté française. Dans les jardins de l'ambassade, le président affiche son ambition : « Changer les regards et les esprits » sur la relation de la France et de l'Afrique, qu'il tente de renouveler depuis quatre ans. En déminant une série de sujets mémoriels, comme lorsqu'il reconnaît jeudi à Kigali (Rwanda) « les responsabilités » de la France dans le génocide des Tutsis, sans toutefois demander explicitement pardon - question sensible dans l'Hexagone - un point sur lequel la presse sud-africaine lui a demandé des explications. En plaidant à Pretoria (Afrique du Sud) pour une plus forte « coopération » face à l'urgence sanitaire, tandis que certains pays africains n'ont toujours pas reçu de vaccin, ou en matière économique.
Aux jeunes : « On va enfin leur dire que l'on va pouvoir bâtir en commun »
Espérant, dans un discours devant la communauté française à Pretoria samedi, un nouveau « partenariat » avec les pays du continent, le voilà qui s'adresse alors aux « millions de jeunes gens » qui, en France, « ont une histoire avec l'Afrique par leur famille, par des générations ».
« On va enfin leur dire que l'on va pouvoir bâtir en commun. On va arrêter de leur dire : C'est un problème et vous devez vous intégrer. On va enfin leur dire : Vous êtes une chance pour la France et vous allez nous aider à développer cette histoire commune », avance-t-il. Un clin d'œil à gauche, cette fois.
En attendant l'heure du bilan, qui dira si sa politique africaine s'avère payante dans un contexte de forte concurrence entre puissances, et tandis qu'il est rattrapé par la crise malienne (il a menacé dans le JDD de retirer les troupes de l'opération Barkhane si le pays allait « dans le sens » d'un islamisme radical), il s'agit aussi de poser des jalons. Et d'adresser des messages à l'opinion. Car à moins de douze mois de la présidentielle, le compte à rebours a commencé.@E