RDC: AFC/M23 consolide sa présence dans la ville d’Uvira, Kinshasa en colère

À Uvira, la situation a basculé en moins de 24 heures. Cette ville de l’est de la RDC est passée sous le contrôle de l’AFC/M23 depuis le 10 décembre 2025. L’entrée des combattants du mouvement, soutenu par le Rwanda d’après les autorités congolaises, burundaises et des experts de l’ONU, s’est faite sans affrontement.

À Uvira, la situation a basculé en moins de 24 heures. Cette ville de l'est de la RDC est passée sous le contrôle de l'AFC/M23 depuis le 10 décembre 2025. L'entrée des combattants du mouvement, soutenu par le Rwanda d'après les autorités congolaises, burundaises et des experts de l'ONU, s'est faite sans affrontement.
Ce jeudi, le groupe politico-militaire consolide sa présence et étend son contrôle sur plusieurs quartiers. De son côté, le président Félix Tshisekedi a présidé une réunion de crise : un conseil des ministres restreint, convoqué en urgence, en présence du chef de l'armée.

À Uvira, dans la province du Sud-Kivu, dans l'est de la RDC, les combattants de l'AFC/M23 sont désormais bien visibles : des véhicules appartenant au groupe armé ont circulé dans plusieurs quartiers ce jeudi. Le mouvement poursuit l'extension de son contrôle sur Uvira.

La veille, Bernard Maheshe Byamungu, chef d'état-major adjoint de l'AFC/M23, est arrivé lui-même dans la ville. Il a lancé un appel aux militaires burundais qui, selon le mouvement, seraient encore présents à Uvira : il les invite à se rendre, promettant qu'ils seront escortés vers la frontière « sans être inquiétés ». Une frontière que l'AFC/M23 contrôle côté congolais, et qui, à cette heure, reste fermée. Parallèlement, les combattants du groupe poursuivent leurs ratissages à la recherche de combattants Wazalendo qui se trouveraient encore dans la zone. Des tirs ont encore été entendus ce jeudi.

Quelques marchés ont rouvert ce jeudi, mais l'activité est restée très faible. Les écoles, elles, sont restées fermées. Des habitants joints par RFI rapportent des coups de feu entendus, notamment dans le quartier Songo. Parmi les rares habitants qui circulent dans les rues, certains ont rapporté avoir vu des cadavres. Une dizaine auraient été ramassés entre mercredi et jeudi, selon des sources locales et des témoins cités par l'AFP.

Les habitants qui n'ont pas fui - faute de moyens ou en raison de la fermeture de la frontière - sont pour la plupart restés chez eux dans l'inquiétude. Les fonctionnaires, membres de la société civile et défenseurs des droits humains, qui craignent des représailles ciblées, comme cela a été observé à Goma ainsi qu'à Bukavu. Certains indiquent avoir reçu depuis mercredi des messages de menaces, de même que leurs familles.


Dans l'opposition congolaise, l'accord de paix était « un piège, la suite était prévisible »
Le Jeudi 11 décembre dernier, après la chute d'Uvira, le président Félix Tshisekedi a présidé une réunion de crise : un conseil des ministres restreint, convoqué en urgence, en présence du chef de l'armée. Le chef de l'État a appelé « à la vigilance » et appelé les forces de défense et de sécurité à « rester en alerte ».

Peu a filtré sur le contenu des échanges. Un Conseil supérieur de la Défense devrait également se réunir bientôt pour décider, selon le gouvernement, des mesures « appropriées » à prendre face à l'évolution de la situation. Le gouvernement congolais demande des sanctions contre Kigali. Même ton dans la famille politique de Félix Tshisekedi.

Du côté de l'Union sacrée, la plate-forme du président congolais, le secrétariat permanent appelle à une mobilisation nationale. Il annonce une marche le vendredi 19 décembre. Son objectif : « Demander aux parrains et témoins de l'accord de Washington de passer des déclarations d'intention aux actes » et d'imposer des sanctions effectives contre le Rwanda, rapporte notre correspondante à Kinshasa, Paulina Zidi.

Autre réaction dans la majorité : la Ligue des jeunes de l'UDPS, le parti présidentiel, presse Félix Tshisekedi de renouveler en urgence le commandement militaire et les services de sécurité. Les députés de la commission Défense et Sécurité devraient eux auditionner les ministres de la Défense et de l'Intérieur.

Pour l'opposant Martin Fayulu, l'accord de paix était « un piège. La suite était prévisible », a-t-il confié à nos confrères de France 24. Autre poids lourd de l'opposition, le parti de Moise Katumbi n'a pas officiellement pris position. Cependant, un de ses membres confie : « Le Président ne croit qu'au dialogue des armes. Mais, même là, il ne sait plus tricher ».

L'avancée de l'AFC/M23 s'invite au Conseil de sécurité de l'ONU
Le Conseil de sécurité des Nations unies se penchera ce vendredi 12 décembre sur la situation dans la région des Grands Lacs... Au cœur des discussions : l'avancée de l'AFC/M23 dans le Sud-Kivu, après la prise de la ville d'Uvira. Mais avant même cette réunion consacrée à la RDC, plusieurs États membres du Conseil se sont déjà exprimés ce jeudi après-midi, lors d'une autre session dédiée à l'Afrique centrale.

Le Danemark parle d'un « conflit dévastateur qui se prolonge » et qui risque, selon lui, « de déstabiliser davantage la région ». Il appelle les deux parties à mettre fin immédiatement aux hostilités. La Corée du Sud exprime la même inquiétude. Elle estime que « les attaques du M23 contre Uvira risquent d'entraîner une extension régionale grave du conflit ». La Grèce, elle, se dit « alarmée » par l'avancée de l'AFC/M23 et par les retombées sous-régionales que pourrait provoquer cette poussée militaire.

La Russie parle d'une région « au bord d'un vaste conflit international » et insiste sur la crise humanitaire qui s'aggrave au Sud-Kivu. La France note « l'offensive du M23 soutenu par l'armée rwandaise ». Paris estime que cette offensive menace la sécurité du Burundi et de l'ensemble de la région des Grands Lacs.

La France alerte également sur ce qu'elle décrit comme la deuxième crise humanitaire la plus grave du continent africain. Devant le Conseil de sécurité,la coordinatrice politique adjointe de la France auprès des Nations unies, Charlotte Saudin, a mis en garde contre les conséquences de l'offensive du M23 dans l'Est de la RDC.

La mission de prévention des conflits du Bureau des Nations unies pour l'Afrique centrale reste essentielle dans un contexte marqué par la fragilité de la situation sécuritaire. Cela est d'autant plus préoccupant dans un contexte où une pression forte pèse déjà sur les ressources disponibles pour l'aide humanitaire. Dans l'est de la République démocratique du Congo, l'offensive de l'AFC/M23, soutenue par les Forces rwandaises de défense, menace la stabilité du Burundi et de l'ensemble de la région des Grands Lacs, une région en faveur de laquelle la communauté internationale s'est mobilisée lors de la Conférence de Paris, le 30 octobre dernier. Pour répondre à la deuxième crise humanitaire la plus importante du continent. La France alerte à l'Onu sur les risques d'embrasement dans les Grands Lacs. La Chine, de son côté, dit suivre la situation avec préoccupation.